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03/05/2016

Une histoire d'amour

On se demande souvent comment pratiquer le seul commandement qu'on trouve dans l'Evangile: "Aimez-vous comme je vous ai aimé" Pas facile vraiment, car Christ nous a aimé jusqu'à en mourir...Une de nos fillettes de 14 ans, Soma, orpheline, simple d'esprit, ne parlant jamais,  mais fort douce, a attrapé la varicelle après qu'une autre l'ait eue. Fort banal ici. Pour éviter la contamination (car on peut en trois jours avoir 40 jeunes atteints, j'ai exigé l'isolation et la quarantaine. Elle ne pouvait rester seule, ayant trop peur des 'esprits'. On a demandé aux responsables une  volontaire  pour rester avec elle. Sous des prétextes divers, aucune n'a accepté. On ne savait trop que faire, Gopa et moi. Tout à coup, une petite voix s'est timidement élevée: "Moi je peux rester avec elle" C'était "Adimoni-ancestrale-prunelle-de-mes-yeux" ('Adi' signifiant "premier" pour les adibassis), notre aborigène Santali  de18 ans. "Mais tu sais que c'est très contagieux, sans conséquence pour les tous jeunes, mais parfois très graves pour les adultes. "Je sais, tu nous l'as souvent expliqué" Alors tu veux rester malgré le danger ? "Nistchoy-bien sûr". Et comme c'étaient les vacances scolaires, les deux se sont installées dans la chambre d'isolation. Personne n'y rentrait sauf moi deux fois par jour. Je me désinfectais pour ma part des pieds à la tête pour que je ne balade pas les virus en pique-nique à travers tout ICOD! La responsable des jeunes glissait sur une chaise les repas mais sans entrer.

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La petite Soma... en est ressorti après 15 jours, sans trop de dégâts. Après plus d'un mois, Adimoni y est encore, car elle a été infectée  gravement. Le virus de la varicelle s'acharne sur les adultes parfois jusqu'à la défiguration à vie, d'autres fois jusqu'au décès par bronchopneumonie, surinfection staphylococcique, voire même encéphalite. Au quatrième jour, j'étais prêt à appeler un médecin. Ce qu'on ne fait jamais pour une varicelle. L'apparition des pustules a été fulgurante sur tout le corps. Les muqueuses de la  gorge, des narines et des oreilles ont été touchées, ce qui est très mauvais signe. Elle ne pouvait plus parler (ou du moins moi, je ne pouvais plus l'entendre!) Heureusement, le visage n'a été atteint que plus tard et ne semble avoir été que superficiellement envahi. Pour une jeune fille, c'est le souci capital. Elle en porte encore les stigmates après un mois, mais elles disparaitront sans laisser de traces, sauf sur certaines parties du corps. Elle a beaucoup souffert pendant la deuxième semaine, mais jamais, jamais elle n'a émis une seule plainte. Quand elle ne pouvait plus parler, j'ai pensé qu'elle m'en voulait parce que je l'avais laissée se dévouer. Mais ensuite, elle m'a expliqué: "Jamais je n'en t'ai voulu, c'est moi qui l'ai décidé" Elle aurait pu littéralement y laissé sa peau (cicatrices, qui parfois empêchent le mariage) ou sangloter, ou regretter, ou se fâcher contre Dieu, ou etc. Mais non. Elle a souvent dit: "Vous priez  le Grand Dieu (le Mahadev-Shiva de ses tribus, et pour moi le Père de Jésus) et tout ira bien" J'en avais parfois les larmes aux yeux. Un tel dévouement, pouvant provoquer un tel dénouement (cicatrices, déformations, voire mort) est le signe même qu'elle a compris intérieurement le commandement évangélique, sans même le connaître. Et cela, je puis vous l'assurer, est une leçon d'amour désintéressée pour moi aussi, prouvant "qu'il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour son prochain" comme le disait Jésus-Christ. 

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Merci de ton témoignage de compassion et de bon cœur, petite Adimoni-ancestrale-prunelle-de-nos-yeux" .

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