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13/08/2018

NOUVELLE VIE POUR LES ÎLES DES SUNDARBANS

Voici un texte de Gaston où il montre que le grain semé peut produire des grains longtemps après !

J’ose rappeler aux milliers de donateurs d’ASSS (Amis de Seva Sangh Samiti), puis d’AVTM (Amis des Villages du Tiers Monde) qui ont pris la suite, que ce sont vos dons depuis 50 ans (sic !) qui ont permis aux équipes médicales de «Pilkhana-Cité-de-la-Joie» d’aider à créer SHIS en 1990, de démarrer le centre de SSS Jhorkhali au temps des cyclones (1991+1993), de créer un dispensaire à long terme, un superbe abri anticyclone et du travail de développement rural jusqu’à ce jour.

Waheb et ses équipes ont pris la relève dans toutes les îles jusqu’au début 2018, et maintenant, il coopère avec une OG (organisation gouvernementale) et un donateur international pour compléter la trilogie des actions menées depuis 38 ans et préparées par vous tous depuis environ 40 ans dans le delta !

Voyez comme les actions se sont enchaînées comme par miracle, et que sans les humbles débuts dès avant la création du petit dispensaire du Docteur SK Sen de Pilkhana en 1967, puis du centre médical en 74, rien n’aurait eu lieu, même pas SHIS commencé par SSS et le soutien ensuite de Dominique Lapierre jusqu’en décembre 2017. Qui aurait crû ?

Chrétien, bien sûr j’y vois la main aimante du Père Céleste de toute Miséricorde. Qu’il soit loué et bénit pour les semences du passé et pour la récolte d’aujourd’hui.

 

UNE NOUVELLE VIE POUR LES ÎLES DES SUNDARBANS !

« Mais mon ami musulman Waheb m’a donné aussi la merveilleuse information d’un autre vrai miracle :

Le ministère de la santé de Delhi cherchait une ONG capable d’implanter et de suivre un projet géant contre la tuberculose financé par « Global Funding » de Genève. Waheb a présenté son travail de trois décennies dans les îles du Delta gangétique, et son organisation « SHIS » a été choisie comme partenaire.

Immédiatement, une campagne de détection porte à porte par 34 jeunes insulaires a démarrée pour 45 îles habitées par 4,5 millions d’habitants en ajoutant les périphéries des grandes rivières qui les traversent. La deuxième étape étant d’augmenter les infrastructures, Waheb a déjà contacté 1900 ‘quacks’, docteurs locaux sans diplômes qui soignent la population à la place des docteurs MBBS diplômés qui pour rien au monde n’y vivraient. Nous en savons quelque chose nous et les ‘infirmières aux pieds nus’ qui y avons travaillés durant des années dès 1981 durant le premier cyclone de Jhorkhali qui avait laissé des centaines de morts. Quelques années plus tard, nos gars ont creusé des puits tubés (jusqu’à 400m. de profondeur) dans chacune des 54 îles. Enfin autour de 1990, nous avons modifiés dans les docks d’Howrah quatre grands bateaux pouvant porter cent passagers, afin qu’ils puissent abriter une salle de radiologie et une autre avec laboratoire médical, le tout au service de l’éradication de la tuberculose dans les îles. Mais l’emploi de médecins individuels (ils ne voulaient pas dormir sur place !) a ralenti l’efficacité de l’ensemble. Et maintenant, la troisième phase du nouveau projet comprendra l’emploi de 2000 docteurs qui utiliseront les examens et traitements les plus en pointe. 240 000 euros par an pendant 3 ans seront affectés à ce projet d’éradication totale. J’avais toujours estimé que seule une action d’envergure serait nécessaire pour gagner la partie dans ces lieux si inhospitaliers, la base en est enfin jetée. 

08/06/2018

   UNE HÉCATOMBE D’ONG (Organisations non gouvernementales)

Dans sa dernière chronique Gaston décrit les difficultés éprouvées par de nombreuses ONG en Inde à la suite de la décision gouvernementale obligeant les organismes s'occupant de mineurs d'avoir une licence en accord avec la nouvelle législation.

Comme le dit Gaston :" Nous sommes certes heureux – et plus qu’heureux ! – que le gouvernement se soucie maintenant de se mettre au diapason des promesses internationales signées dans les traités de Protection des divers groupes défavorisés, mais la prise en main par des professionnels souvent – bien que pas toujours – non motivés, rend bien caduques ces efforts."

Espérons que ces difficultés ne seront que passagères et que les ONG pourront reprendre avec leur licence leur action au profit des plus déshérités. 

 

Premier janvier 2018 :

La Cour Suprême indienne ordonne à tous les Etats de l’Union de vérifier que toutes les organisations de PROTECTION DE L’ENFANCE ET DES FEMMES (CWC) s’assurent que toutes les ONG qui s’occupent de mineurs aient une Licence selon les nouvelles lois, avec des employés ayant les capacités professionnelles exigées. Au cas où elles ne l’auraient pas, inspection immédiate doit être faite et toute ONG suspectée de ne pas faire son devoir doit être fermée immédiatement. De plus, toutes les ONG médicales (surtout les hôpitaux privés dont ¼ n’ont pas de licences), sociales, religieuses ou autres doivent avoir une licence valide avec du personnel en règle selon leurs qualifications. Quelles que soient les ONG, tout à partir du premier janvier doit être réglé en informatique. Du coup, c’est la panique et le rush des organisations responsables par Etat et District pour tout régulariser. Et c’est le branle-bas de combat pour tous ceux et celles qui comme nous avaient déjà fait plusieurs demandes de régularisations mais sans avoir eu de réponses, les fonctionnaires indiens n’étant pas connus pour leur excès de zèle, y compris ceux des impôts ! A fortiori les autres.

Et le 12 février, nous voilà nous-mêmes happés par la tornade administrative dont on ne sortira que le jour où nous aurons nos sept licences pour nos sept départements, car contrairement aux autres ONG, nous avons un mélange de déshérités hommes et femmes, jeunes et vieux, infirmes et malades mentaux, orphelins et semi-orphelins, ce qui faisaient lever les bras au ciel de nos responsables du CWC qui tentaient de regrouper nos différents groupes. En effet, notre concept familial semble maintenant suranné. Tous les handicaps étaient libéralement mélangés, avec même des tous jeunes bambins de quatre ans étant, oh horreur, avec les fillettes, et les vieillards vivant dans des bungalows au milieu des garçons. Même si à leur grand soulagement, ils ont constatés que les filles étaient complètement séparées – et à grande distance ! – des garçons, ils semblaient parfaitement interloqués : « On n’a jamais vu ça nulle part ! » Ce qui trahissait leur vrai souci : « Comment mettre cela en ordre sous ordinateur ? » Il est vrai qu’ ICOD a de quoi décontenancer, car c’est tout à la fois orphelinat, hospice, refuge, école, éducation culturelle, oeuvre préventive et sociale, religieuse et inter-religieuse…mais quand-même bien fermement laïque.

Nous nous sommes donc lancés avec Gusto dans la réorganisation, mais comme cela tombait plus que malencontreusement avec la diminution des fonds et de l’arnaque organisé du sept février, cela ressemblait plus à un cyclone qu’à une simple tornade, surtout lorsque Gopa allait au centre de Howrah envahi par une foule anxieuses de responsables d’ONG où se trouvaient Kamruddin, ABC, les Frères MC de Mère Teresa, ceux de Don Bosco s’occupant des gosses des rues, et plusieurs autres ONG connues. Mais les responsables gouvernementaux ont été à quelques exceptions près fort compréhensifs. Sauf un braillard : « renvoyez immédiatement tous les enfants qui ne sont pas orphelins complets !» Et un grand dirigeant d’expliquer suavement : « Nous ne sommes pas vos ennemis. Nous avons été travailleurs sociaux comme vous, mais maintenant nous voulons vous aider à obtenir la licence, pas vous faire fermer… sauf si vous n’essayez pas de nous comprendre ! »

 

Je donne sous-dessous quelques exemples des difficultés rencontrées par d’autres ONG.

 

Mon ami de toujours Kamruddin fondateur d’UBA, dont l’organisation a été abusivement et injustement fermée, garde encore la responsabilité de 22 des 45 femmes déshéritées ou ex-prostituées amenées par la police de la gare d’Howrah depuis 12-15 ans. Il essaye en vain de les donner à ICOD. Nous avons bien sûr accepté dès septembre 2017 et en même temps, nous lui donnons l’argent pour les nourrir. En avril, le CWC lui a dit : « Pourquoi voulez-vous les donner à ICOD ? C’est nous qui vous indiquerons l’ONG où les envoyer ! En attendant réglez la situation administrative des trois enfants dont la maman est chez-vous. Ils ne resteront pas tous avec elle» Et depuis ce mois, une gamine de 12 ans sourd-muet a été envoyée à ABC. C’est le drame des restructurations, l’aspect humain restant souvent secondaire.

Pour nous se pose le même problème pour nos gosses benjamins dont les mamans sont malades mentales. Si elles reconnaissent leurs enfants, ils doivent aller dans une autre ONG spécialisée. A ICOD, comme les femmes mentales et les enfants vivent séparément même si elles se voient souvent, on peut obtenir la permission de les garder. Mais pas ailleurs. Et même si d’aventure la maman est trop atteinte pour reconnaître son gosse, celui-ci est appelé ‘orphelin’ et doit aller dans un orphelinat en attente d’adoption. Cela fait frémir !

 

Cela a été le drame des orphelins de mère Teresa : ses dizaines de milliers (sic) orphelins dans ses centaines d’orphelinats ont dû être transférés au gouvernement. Et les Soeurs ne peuvent plus faire d’adoptions, n’acceptant pas les règles gouvernementales. Moi non plus d’ailleurs, car transformer un bébé en numéro adjugé au jugé au premier parent adoptif venu, soit-il célibataire, jeune, homosexuel, lesbienne, famille nombreuse ou couple séparé, tout est bon et chacun aura le numéro (et oui) qu’il demande sans savoir si c’est un gars ou une fille, un handicapé ou un aveugle. Cela favorise les trafics de tous genres. C’est horrible, et ICOD ne prendra donc plus d’orphelins. Nous essayerons néanmoins de garder notre petit BROTO en demandant au père qui nous l’a donné de signer un papier comme quoi il veut qu’il reste à ICOD et que si par chance il se remarie, il le reprendra. Une demi-vérité peut-être, mais qui peut arriver (d’après lui), et qui permettrait à ce gosse sans espoir aveugle, sourd, muet et paralysé de continuer de vivre dans la joie avec nous jusqu’à sa mort si nécessaire, donc encore environ dix ans à mon sens puisqu’il a une encéphalomalacie bilatérale extensive qui ne pardonne pas ! Et que deviendrai-je moi-même si je ne puis plus lui donner mes vingt minutes quotidiens de bavardage et d’aubade dont il semble écouter quasi-religieusement les vibrations, ce qui le pousse souvent à rire aux éclats ?

Quant aux Frères de Mère Teresa MC (Missionnaires de la Charité, dont le responsable Frère Paul vient me voir), qui ont, eux, des milliers d’handicapés, de nombreux centres ont dû fermer car ils ne peuvent pas payer les professionnels qui sont nécessaires, ou que les professionnels refusent de travailler plus de tant d’heures alors que le soin de ces fous ou invalides qui pourraient tous être admis au Cottolengo de Turin exigent des soins de 24 /24 heures !

 

Asha Bhaban centre (ABC) de Papou et Sukeshi s’en voit aussi de belles. Certes, ils ont réussit en se battant depuis trois ans d’obtenir une licence pour leur centre principal Kathila. Mais ils ont dû auparavant renvoyer tous les garçons handicapés pour ne garder que les filles, et accepter de prendre les enfants envoyés par le gouvernement, des bébés orphelins trisomiques mongoliens, qui vivaient dans la souillure d’un centre officiel que personne ne voulait adopter. Et ABC en est fort heureux. Ils ont je crois actuellement 100 gosses pris en charge par le gouvernement. Il a maintenant les professionnels adéquats. Il forme même dans le cadre universitaire près de 100 professionnels pour les malades mentaux. Mais Papu continue à lutter pour les licences de ses centres ruraux d’autres Districts, et ses milliers d’infirmes sans aide probable immédiate du gouvernement, ainsi que ses six écoles. Sans fonds suffisant après la fermeture de la Fondation Lapierre, il n’est pas au bout de ses peines, encore qu’il soit satisfait d’avoir pu remplir toutes les conditions exigées pour qu’ABC continue son magnifique travail d’amour. Mon ami suisse Alibaba vient d’accepter de prendre en charge les six écoles. Un ami tessinois de toujours, Giovanni, offre une contribution annuelle des plus importantes, en fait, le pilier indispensable qui permet à Sukeshi de dire : « maintenant, nous pouvons envisager sereinement l’avenir. »

 

Mon frère Waheb de SHIS vient de me décrire un bien impressionnant et triste tableau : « Pratiquement toutes nos actions philanthropiques sont fermées actuellement, et nous avons totalement arrêté d’aider les plus pauvres par manque de fonds. Tous nos centres médicaux ne marchent qu’avec la contribution des malades. Comme il est impossible de payer le personnel avec, docteurs et paramédicaux nous quittent…

Depuis 35 ans, nos préventions et traitements de la tuberculose ont été acclamés dans toute l’Inde. Aujourd’hui, le gouvernement exige qu’à tous les niveaux, nos travailleurs sociaux expérimentés laissent la place aux professionnels enregistrés par lui. Comme cela nous est impossible, l’aide officielle a été retirée, et après avoir éradiqué la TB dans des milliers de villages, nous devons tout suspendre, faute de fonds. De même le travail irremplaçable de nos grands bateaux-dispensaires du delta des Sundarbans devra cesser en juin, puisque l’aide est coupée. De même les centres de soins pour les yeux fermeront en septembre. Seuls resteront les trois centres d’accouchement dont le financement continuera.

Notre moderne mais déjà ancien hôpital ophtalmologique qui était en pointe il y a 25 ans et a formé des centaines de médecins aux opérations ultramodernes, a dû fermer ses portes car on nous demandait d’avoir de nouvelles licences pour la sécurité, pour la rénovation du matériel et pour la restructuration des cliniques. Un bon nombre de personnel reste sur place mais n’est plus payé. Que deviendront-ils ?

Nos centres ruraux et de jungles des districts du Bengale du Nord financé par « World Vision » sont presque tous fermés pour cause de non renouvellement de licences.

Ne demeurent pour nous que trois centres d’accouchements dans les îles des Sundarbans, lié à un nouveau programme antituberculeux, les projets d’éradication de l’arsenic dans les puits d’eau potables, un centre mobile de santé jusqu’en juin, quelques centres antituberculeux dans quelques districts du Nord, mais qui ne dureront pas longtemps sans support permanent. Enfin, le gouvernement nous promet de nous aider encore six mois pour faire tourner les cliniques de santé générale dans les îles »

Et mon ami de quarante ans Abdul Waheb de conclure tristement : « La plupart de nos salariés ont acceptés de travailler à 25 % ces derniers mois. Mais pour encore combien de temps ? Nous ne pouvons plus compter que sur Allah. Nous aidons encore 2,5 millions de personnes par an, mais en 2020, nous devrons tout arrêter ! Après 38 ans de lutte mais dans la joie, c’est dur ! »

 

Mon frère prêtre des « Pèlerins de la Charité » rapporte le même tableau. Il partage depuis 14 ans la vie des gosses des rues dans la deuxième grande gare de Kolkata, Sealdah. Il vient régulièrement faire ses jours de récollection à ICOD. Il ne peut plus ramasser les gosses « perdus » sans se faire soupçonner de les trafiquer. S’il prend une ambulance pour apporter un grand grabataire trouvé sur un quai, on pense qu’il le kidnappe ! Il n’a aucun permis à montrer. Ses travailleurs sociaux n’ont pas les diplômes nécessaires et ne peuvent plus fonctionner. Il a déjà fait plusieurs mois de prison pour avoir emmené des enfants en piquenique…Il ne tient pas à renouveler l’expérience. Son équipe se composait de treize gars sortis des égouts. Il ne peut plus n’en garder que trois. Il se demande bien comment continuer son action caritative, et surtout humaine. Et il vient me voir comme tant d’autres pour recevoir des conseils, alors que je suis aussi impuissant qu’eux tous !

 

L’ONG fondée depuis 40 ans par le P. Laborde, Howrah South Point ploie sous les difficultés, car elle travaille sur plusieurs Districts et ne peut répondre immédiatement aux oukases du gouvernement qui veut remettre en cause certains projets ou écoles. Des membres m’ont informé récemment qu’ils craignaient aussi le pire. Malgré son grand âge (il va sur ses 92 ans !), le P. Laborde continue à essayer de sauver ce qui peut être sauvé et va régulièrement les aider pour résoudre des problèmes difficiles. Il a un courage extraordinaire et ne se laisse jamais abattre. Mais ses anciens travailleurs sociaux, dont quelques âmes extraordinaires comme Agnès, ancienne responsable, sainte toujours souriante malgré son handicap profond de naissance, ne possèdent aucun certificat professionnel légal. Et HSP soutient des centaines de pensionnaires !

 

Un grand et cher ami français, André Mâge, travaillant pour le SIDA en Andhra Pradesh (Sud de l’Inde) m’écrit qu’il a dû fermer plusieurs cliniques de prévention et traitement de centaines de cas de Sida, surtout de mamans et bébés VHI que les hôpitaux d’états négligeaient jusqu’alors. Il ne garde plus qu’un hôpital, alors que c’est lui qui avait commencé en cet Etat le traitement scientifique de cette maladie encore bien honteuse en Inde et que peu de docteurs traitent convenablement. Il ne peu plus continuer, car son personnel n’est pas assez qualifié, malgré leur grande expérience. Il faut aussi adapter tous les départements aux normes nouvelles et rien n’y fait, ce sont des diplômés de l’Etat qui doivent occuper les postes. Encore un an et son équipe arrête tout. Il est lui-même retourné en France le coeur brisé, encore qu’il continue à supporter le fondateur qui tient à lancer un projet pour les déshérités. Un peu dans la ligne d’ICOD. Et en rencontrant les mêmes problèmes.

 

Et ce 29 mai, je rajoute les plaintes de mes jeunes frère et sœur Evadât et Mina de Paras Padma qui, malgré avoir reçu leurs deux licences, se voient soudain acculés à choisir, car le gouvernement n’accepte pas que les gars et les filles handicapées vivent dans le même centre, même s’ils habitent séparément ! Pourquoi ne le leur avait-on pas dit avant ? Simplement je pense, parce que souvent les fameuses lois sont interprétées différemment selon les personnes responsables ! On l’a vu à ICOD quand on nous dit un « non ! » ferme, qu’un simple recours nous donne ensuite la permission ! Je vais leur écrire ce soir pour les tranquilliser…

 

Je pourrais donner une liste d’ONG travaillant pour les sourds-muets, les malades mentaux, les IMC, les brisés ou blessés de la vie, qui ne peuvent plus continuer devant les exigences nouvelles. Le gouvernement n’a pratiquement rien fait pour ces gens dans le passé, des milliers de travailleurs sociaux ont donné leur vie pour ces rejetés de la société, et non seulement on ne les reconnaît pas, mais en plus on les rejette pour privilégier les …privilégiés. Certaines ONG de pointe surnagent encore, comme ABC, « HOPE » et quelques autres, mais pour combien de temps encore ? En fait, seuls les défavorisés continueront à survivre comme ils l’ont fait depuis des millénaires, notre aide, voire notre amour ayant été appréciés pour le temps que le Seigneur a bien voulu nous donner pour eux ! Et ils s’en passeront quand nous arrêterons, même si leurs souffrances doivent augmenter !

 

Nous sommes certes heureux – et plus qu’heureux ! – que le gouvernement se soucie maintenant de se mettre au diapason des promesses internationales signées dans les traités de Protection des divers groupes défavorisés, mais la prise en main par des professionnels souvent – bien que pas toujours – non motivés, rend bien caduques ces efforts. Mais je sais qu’il faut des victimes pour que leur sang arrose les sillons semés vaillamment depuis presqu’un siècle en Inde (en fait 1835 au Bengale), et que ceux et celles qui se sont occupés de toutes leurs forces, de tout leur coeur et même de toute leur âme, des plus petits, des derniers et des abandonnés, sachent combien leur vie a été belle malgré les blessures reçues et les déceptions subies. Il leur reste à endurer peut-être le plus dur, la dérision et l’oubli, et surtout la disparition progressive de ce qu’ils avaient créés. (Sukeshi en est un témoin profondément meurtri) Et se retourne définitivement ce qui nous motivait le plus : « D’avoir été toute notre vie serviteurs des plus pauvres, nous sommes en voie de devenir serviteurs des professionnels » Mais jamais moi, je ne pourrai l’accepter. JAMAIS, sauf si je considère que « Jésus (P.C.) » a reçu son diplôme de Professionnel de la Compassion. Car alors…

Mon âge avancé (pour l’Inde !) m’épargnera ces déboires, et ma confiance irrépressible en Dieu m’oblige à penser de tout mon être, que ce qui a été fait ne s’effondrera jamais, car si le plus petit geste d’amour demeurera pour l’éternité, si un seul atome de compassion, comme dit le saint Coran, ne s’effacera jamais, alors, il importe peu que rien ne demeure comme aujourd’hui, puisque tout restera à tout jamais témoignage que quand l’homme se met à aimer l’homme, il ne peut qu’avoir contribué à créer une Humanité plus humaine que jamais, alliée à une éternité divine qui se doit de transformer en lumière toutes les ombres de la vie. O.M.G ! (l’expression anglaise passe-partout pour : « Ô mon Dieu !) Comme la vie est belle, tout de même !»

Mère Teresa avait une manière magnifique de trouver une solution à une impasse de ce genre : «Essayons de plus en plus d’améliorer nos fonds d’amour, de compassion, de compréhension, de gentillesse et de paix, et l’argent suivra. Mais seulement si l’on « cherche tout d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, car alors, tout le reste nous sera donné de surcroît » Et quand on sait que le Royaume dont parle ‘l’Evangile de la Grâce’ de Jésus, tout comme les Evangiles de Ramakrishna ou de Bouddha sont basés sur la compassion et le service des plus pauvres, alors, on ne se fait plus de soucis du tout : « Deus providebit » est-il écrit superbement sur les pièces de monnaie… suisses : « Dieu y pourvoira ! » Et pourquoi pas les suisses ?

19/05/2018

Situation des femmes en Inde

De la dernière chronique de Gaston, nous extrayons ce passage qui décrit les diverses influences qui s'exercent sur la justice et les représentants de l'ordre plus particulièrement lorsque sont inculpés des coupables de crimes contre des femmes.

Nous avons été invités coup sur coup à deux importantes assemblées organisées par les communes. Et pour une fois, non politiques ou religieuses. La première eut lieu à 8 km d’ici, dans une petite bourgade sans intérêt, devant le portique d’un grand temple toujours sans intérêt. Quelques centaines d’invités étaient sur la place, ainsi qu’une intense circulation motorisée avec un grand nombre de tracteurs. Je n’y étais jamais allé. Et mon ami hindou Binay m’a accompagné.

A première vue, l’assemblée était presque entièrement musulmane. Le thème de la soirée était écrit en grand sur un panneau : « Comment promouvoir la paix ? » Evidemment, avec un tel thème, j’étais à l’aise, même si je ne comprenais rien à rien, étant dans ma phase de surdité complète même avec appareils auditifs. Quand on m’a fait signe de prendre la parole, j’ai commencé comme souvent :

« Très chers frères et sœurs… »

Mais je me suis arrêté, ai regardé lentement partout, et ai rajouté : « bien qu’il me semble qu’il n’y ait aucune sœur présente…J’en parlerai plus tard…Nomoshkar »

Il paraît que cela a jeté un froid sur l’assemblée ! Après les présentations de rigueur, j’ai fait remarquer avec tristesse que pour la première fois depuis 46 ans, j’ai honte d’être indien, spécialement à cause de l’extraordinaire augmentation des crimes contre les femmes, et tout particulièrement, les innommables viols contre des mineurs, voire des moins de 12 ans, et ce qui n’était guère pensable avant, de bébés de 4 à 8 mois ! Comment pouvons-nous penser paix quand ces abominations se multiplient ?

Ecoutez, je vais vous dire une chose : il ne suffit pas que ces crimes arrivent, mais chacun sait, et particulièrement certains de ceux qui sont présents ici aujourd’hui, que lorsqu’un crime arrive, viol, je viens de le dire, assassinat divers, accidents mortels de la route où en général les chauffards (chauffeurs de camions pour la plupart) disparaissent immédiatement, il y a ruée dans les commissariats de police :

« Celui-ci ne peut être coupable, je suis ministre, il est de mon parti ! Je suis un imam musulman, celui-là doit être relâché ! Je suis l’évêque de ce diocèse, il n’est pas acceptable que ce prêtre soit arrêté (ceci pour le sud de l’Inde, où les chrétiens sont parfois plus de 30 % de la population). Si vous ne relâchez pas ces six suspects du viol de groupe de cette gamine, mon parti, le RSS hindou, mettra le feu au commissariat ! Ce crime a été commis par un militaire, et l’armée exige qu’il soit libéré sur le champ. Ces coupables présumés sont de ma caste, je suis leur leader, si vous ne les relâchez pas, nous violeront toutes les femmes de ce hameau… » Etc.…

Il n’y a plus de victimes, et elles n’importent plus. Il n’y a plus que des groupes religieux, castes, partis politiques et …chacun à la base même ne voit aucun vrai coupable, quitte à les désigner sur place de force : des pauvres, nomades, hors-castes, Adibassi, musulmans ou chrétiens selon les lieux. « Tous les gens querelleurs, jusqu’au simple mâtin, au dire de chacun était de petits saints » (j’ai essayé de mettre La Fontaine au niveau des gens !)

Comment alors s’étonner s’il n’y a pas de paix, puisque les gens prennent parti, souvent contre la justice, et c’est la bagarre ! Qui paye le prix de cette non-paix ? Les femmes et les enfants, car souvent les maisons ou huttes sont brûlés, les hommes arrêtés ou pourchassés, les familles accusées faussement. Le coût de ces échauffourées locales, ce sont les femmes et les enfants qui les supportent. Et la bagarre, ce sont les hommes, vous et moi, qui les commençons. Et aujourd’hui, je ne vois devant moi que des hommes. Où sont les femmes qui devraient témoigner de l’injustice de ces situations créées par les hommes ? Combien je regrette l’absence de notre secrétaire Gopa qui devait venir. Mais elle est malade depuis hier. Sinon, elle témoignerait mieux que moi, qu’une gosse violée, puis tuée à moins de 12 ans n’est pas un acte politique ou religieux, mais un acte monstrueux et inexcusable commis par un ou des hommes (parfois des adolescents) qui ne rêvent que d’imiter les actes écœurants proposés en détails dans les portables que maintenant les familles offrent en guise d’anniversaire à des jeunes qui deviennent des bouchers. Et que la société semble approuver puisque même lorsque les millions protestent dans la rue, des centaines de millions se taisent, ainsi que notre Premier Ministre dont les ministres eux-mêmes sont souvent les premiers coupables !

Pensons que ces femmes, fillettes et bébés sont les nôtre, les mien ! Je suis célibataire chrétien, mais tous ces gosses, y compris les vôtres sont les miens, et si on doit parler de paix aujourd’hui, parlons surtout de justice, et empêchons qu’en notre village ou District, un crime commis ne devienne pas un jeu pour leaders religieux, de castes ou de partis. Il y a encore 10 ans, on voyait beaucoup de gens venir dans les villages interviewer les gens, par familles : « De quoi avez-vous besoin ? » Depuis 5-6 ans, bon nombre de gens y viennent toujours, mais c’est pour demander : "Quel est ton parti ? …Change-le ou il arrivera malheur à ta femme ou ta fille ! »

Comment pouvons-nous accepter ce langage. Je remercie le Grand Dieu de tous les hommes qu’il nous permette dans le Sud d’Howrah d’avoir une paix relative, mais nous savons tous que tout autour de nous, spécialement dans les riches bungalows gouvernementaux au bord de la Damodar ou du Gange, un peu plus loin qu’ICOD, nos filles sont kidnappées ou payées pour plaire à nos leaders politiques ou nos touristes. Cela arrivera un jour dans votre propre famille. Je prie le Seigneur et prophète Jésus qu’il empêche cela, mais c’est à nous tous de décider aujourd’hui que faire. Je suis certain que les choses changeront, mais en attendant, je vous demande de réfléchir avec l’organisation qui m’a invitée aujourd’hui et que je remercie, ce que vous pouvez faire à votre niveau. A ICOD, nous sommes plus de 200 avec religions, castes, sexes, ethnies, âges, conditions physiques ou mentales différentes, voire quelques personnes folles, et bien je puis vous dire qu’en 15 ans, jamais je n’ai entendu quelqu’un même en se fâchant montrer du doigt un défavorisé en disant : « C’est lui le coupable » quand il ne l’est pas. Nous sommes une famille. Votre village est votre famille. La paix doit être la règle, ainsi que la justice. Un des vôtres a commis un crime. C’est lui le criminel, et pas son voisin d’un autre village. Mes amis et jeunes frères, la paix est à ce prix, et je la souhaite de tout cœur pour vous »

 

Ce n’est pas exactement ce que l’auditoire attendait de moi, et j’ai rarement été témoin d’un tel silence…car évidemment, j’ai donné des faits ou des historiettes pour illustrer le tout. Et comme d’habitude, j’ai plaisanté. Mais personne ne riait aujourd’hui. Comme je ne prépare jamais un speech, je ne peux pas prétendre que mes paroles sont exactes. Mais l’esprit – et ma foi la lettre – y sont plus que certainement. Au milieu du discours, un tracteur est arrivé pétaradant et a passé juste sous le podium. Il y avait au moins 20 femmes voilées 100 % et toutes de noir sur sa remorque, et j’ai vite compris les gestes de réprobation de mes interlocuteurs, furieux de ce rappel intempestif de l‘absence des femmes ! Et les responsables m’ont fait savoir le lendemain avec gentillesse, qu’ils viendront me voir…